Bonjour,
À l'approche de ma date prévue d'accouchement, je me sens très seule et j'ai donc décider de raconter ici mon histoire puisque je n'ose plus en parler avec les gens de mon entourage.
Pendant un an, j'ai eu des cycles menstruels de plus de 40 jours. J'y ai donc cru souvent, j'ai fait beaucoup de tests de grossesse et j'ai pleuré souvent en constatant que ces tests étaient négatifs. En septembre 2010, après plus d'un an d'attendre, miracle, un test vire positif. Pas seulement un test, mais bien les trois que j'ai fait dans la même soirée (je n'y croyais vraiment plus).
Un mois plus tard, je passe ma première écho et 2e miracle: j'attends des jumelles identiques. Je n'en revenais tout simplement pas, c'est tellement le genre d'histoire qui arrive juste aux autres. Bien non, à moi aussi apparamment ça peut m'arriver. Vers ma 16e semaine de grossesse, le mal de coeur et les brûlements d'estomac me lâchent enfin, et les vêtements de maternité deviennent utiles. Enfin, j'ai l'air enceinte et pas juste bouboule. Je suis heureuse comme je ne l'ai jamais été. Ma gynéco m'averti que je dois arrêter d'enseigner à ma 20e semaine parce qu'une grossesse gémellaire présente plus de risques. Pour l'instant tout va très bien. Je sais donc que lorsque je quitterai pour les fêtes, je n'enseignerai plus avant l'automne 2012. Je me fais des plans et j'ai très hâte. Je vais avoir quelques mois pour faire ma chambre de bébé, pour me reposer et faire ce que je veux. Je me trouve super chanceuse, plus de planification de cours ou de correction, et juste du temps pour moi avant d'avoir mes petites puces.
Une semaine avant mon congé, le 16 décembre, je passe mon écho de morphologie. Mon copain ne pouvant être avec moi, j'invite ma mère, qui prends congé et faire une heure de route pour être là. On se planifie une super journée mère-fille. 5 minutes après le début de l'écho, le médecin arrête en se choquant. Il me dit que je lui fait perdre son temps, qu'on ne peut faire une écho de morpho à 17 semaines. Or j'en suis à 19 semaines. Ma gynéco, après s'être un peu chicanée avec le médecin de l'écho, m'envoie au centre de grossesse à risque pour vérifier ce qui ne va pas. Elle soupçonne une discordance de croissance. Bon, c'est plate, mais ce n'est pas la fin du monde.
Le 22 décembre je me rends au centre de grossesse à rique avec mon copain. On fait l'écho, puis la résidente reviens dans la salle avec le gynéco. Celui-ci nous dit: ça regarde mal! (d'un ton plutôt léger). Puis il nous assome: vos filles ont une trisomie 18, un syndrôme transfuseur-transfusé, on ne réussit pas à voir la vessie de la plus petite et la plus grande a de graves malformations cardiaques. Bref, vous n'avez pas d'autres choix que d'interrompre la grossesse. C'est pas des bonnes nouvelles hein!
Et c'est à partir de ce moment que le monde a cessé de tourner pour moi. À notre demande, il a fait une amniocenthèse, mais il ne s'est pas gêné pour nous dire que ça servait à rien. Je ne pouvais pas m'empêcher de douter, parce que nous avions fait le préna-test et tout était super beau.
Le lendemain, 23 décembre, je vais voir ma gynéco avec le dossier. Elle est complètement sonnée et me dit que l'état de mes filles a chuté incroyablement vite. Je lui parle du traitement à Ste-Justine pour le syndrôme transfuseur-transfusé et elle m'arrête en me disant que l'état de mes filles est tellement grave qu'ils ne voudront même pas me le donner. Selon elle, mes filles ne se rendront pas au-delà de 24 semaines de grossesse (j'en suis à 24 à ce moment). La seule option qu'on a, c'est de choisir quand on interrompt la grossesse.
Plutôt que de me demander à chaque jour si elles sont mortes à l'intérieur de moi, je décide d'en finir. Je sors de son bureau et me dirige directement en salle d'accouchement avec ma mère et mon chum qui comme moi, ne croient pas que tout ça est vraiment en train de se passer. Ma gynéco me dit que ça dure normalement 12 heures et que comme mes filles sont petites, je n'aurai pas à pousser.
20 heures plus tard, elle se tanne et crève mes eaux. Comme je ne suis pas dilatée au maximum, je dois pousser les deux fois. C'est ainsi que j'accouché de mes deux petites filles le matin du 24 décembre 2010.
Je les ai tenu longtemps dans mes bras. Lorsqu'il a été le temps de quitter, je les ai déposé sur la table et alors que mon chum me tirait sur le bras pour qu'on sorte je lui ai dit: ben voyons, on peut pas les laisser toute seule. C'est quand j'ai vu le regard qu'il me lançais que je me suis rappelé qu'il ne pouvait rien leur arriver, puisqu'elles étaient déjà mortes.
Ça fait un peu plus de 4 mois maintenant, et tout le monde a hâte que j'aille bien. Donc quand on me demande comment je vais, je fake que je vais bien et je pense que tout le monde me croit. Du moins ça fait leur affaire de me croire. Mais en réalité je ne vais pas bien du tout. Je me sens complètement blasée de tout. Je me sens vide et seule. Parfois je pleure tellement que je finis par en avoir envie de vomir. Plus rien n'a de sens et j'ai l'impression d'être condamnée à passer ma vie sans joie. Comme si d'ici à ma mort, j'allais exister sans vivre.
Voilà, je ne sais plus quoi dire. Je suis désolée si j'ai noirci votre journée en lisant mon message.