Bonjour,
Après vous avoir lues quelques temps, j'ai enfin décidé de m'inscrire pour pouvoir partager, si possible, sur ce qu'il nous arrive à toutes.
Je suis tombée enceinte de jumeaux, grossesse non désirée difficile à accepter pour moi, je ne souhaitais pas une grossesse maintenant et encore moins gémellaire vu notre situation (ensemble depuis très peu de temps, vivant séparément, pas envie de me relancer dans une histoire, boulot très prenant...). Ma grossesse s'est très bien passée, j'attendais un garçon et une fille qui se développaient très bien.
J'avais mon dernier rendez-vous de suivi à 38+4SA, je tenais à y aller pour revoir la sage-femme qui m'avait suivie donc j'avais dit à mes enfants d'attendre cette date pour arriver. Elle m'ausculte : dilatée à 3 : on passe en salle pour le monitoring et surveiller les contractions. Je les gère bien, je ne savais même pas que c'était ça.
Puis elle me propose un décollement des membranes car les contractions s'espacent : OK mais elles sont finalement déjà décollées sauf à un endroit. Le travail reprend.
On passe en salle de travail vu que le col s'ouvre de plus en plus, on me pose la péridurale et le travail continue, lentement, donc on me pose une voie pour l'ocytocine, les contractions repartent bien, mon col s'ouvre à 8 mais quasi pas de contractions utérine, les bébés ne descendent pas. Ils me laissent une dernière chance pour la voie basse mais ça ne vient pas, arrivée à quasi 9 de dilatation les bébés sont toujours trop haut malgré une rupture de la poche des eaux du premier.
On part pour une césarienne d'urgence après 15h de travail. Je n'en voulais pas, je sentais que quelque chose irait mal sans savoir quoi, ni pourquoi.
Et là tout a basculé. Mes bébés allaient bien, bougeaient, etc. Mais quand ils ont ouvert, ils ont découvert que mon utérus avait tourné, coinçant mon fils trop bas pour qu'ils le sortent. Ils ont ouvert plus grand, m'ont manipulée pour tourner l'utérus mais n'y arrivaient pas. Ils ont fini par sortir ma fille avant qu'elle ne souffre et ils ont enfin pu sortir mon fils... sans vie. Il était en arrêt cardiaque. Ils l'ont massé et son cœur est reparti. En me manipulant, ils ont décollé son placenta, il a fait une hémorragie et a dû être transfusé. J'ai aussi fait une grosse hémorragie et n'ai pas pu être transfusée (mes veines lâchaient toutes).
L'ambiance était lourde dans la salle, je ne savais pas ce qu'il se passait, je sentais tout, j'avais mal, je sentais qu'on me bougeait dans tous les sens, que quelque chose se passait mais je pensais que c'était moi qui allait y rester, pas mon fils.
Et puis ils nous ont expliqué ce qu'il s'est passé, on a pu le voir dans son caisson, branché de partout avant qu'il parte dans un hôpital spécialisé. Puis ils m'ont rapporté ma fille pour la première tétée. Nous étions désemparés. Mon fils allait bien et pour un accident qui n'aurait jamais dû arriver il allait mourir...
Nous sommes allés le voir en fin de journée et avons demandé à ce qu'il revienne dans l'hôpital où j'étais, peur que son cœur lâche et qu'il meurt seul, loin de nous.
Il est arrivé le lendemain matin. Nous étions totalement perdus dans le temps, impression que des jours et des jours étaient passés, de vivre un cauchemar. Pourquoi lui ? Pourquoi nous ? Tout allait bien, pourquoi un accident si bête ?
On ne peut pas en vouloir à l'équipe médicale, elle a fait ce qu'elle a pu mais un goût amer reste en nous.
Le lendemain, nous avons dû prendre la décision de laisser partir notre fils. Notre famille est venue découvrir nos enfants puis nous avons passé un dernier moment tous les quatre, comme on aurait dû l'être pour toujours, comme nous devrions l'être aujourd'hui, comme la vie nous l'avait promis alors qu'on ne lui avait rien demandé. Et nous avons dit adieu à notre fils qui est parti lentement dans nos bras.
J'ai beaucoup de mal à accepter son départ, sa sœur me renvoie sans cesse au fait que lui n'est pas là. Ca fait un peu plus d'un mois et je souffre toujours autant. Je m'étais inscrite sur un forum de jumeaux en début de grossesse, j'y ai connu des personnes géniales, y ai eu du soutien mais maintenant ça me fait mal de les lire se plaindre d'être débordées, de craquer, d'être fatiguées quand elles ont la chance d'avoir leurs deux enfants avec elles. Moi aussi je veux mes deux enfants ! Moi aussi je veux être débordées, pouvoir voir mes deux enfants, les voir grandir ensemble, que les gens me cassent les pieds car ce sont des jumeaux...
Il était beau notre fils tellement calme et serein.
Maintenant, il faut apprendre à vivre sans lui.
Avec les questions des gens qui ne voient que ma fille "et l'autre est où ?", "vous n'attendiez pas des jumeaux ?" et devoir sans cesse se remémorer ce cauchemar dont on ne sort pas et répondre que nous avons perdu notre fils. Et ça va durer encore longtemps...
J'imaginais bien que ça devait être difficile de perdre un enfant, mais imaginer et ressentir, ça n'a rien à voir. J'ai découvert la joie de devenir mère en même temps que la douleur de perdre un enfant et jamais je n'aurais pu imaginer à quel point ça fait mal. J'essaie de profiter au possible de ma fille, même si je pleure encore, même si mon fils me manque, j'essaie de me réjouir qu'elle soit là.
Et puis après mon rendez-vous avec le médecin il y a peu, je me suis de nouveau effondrée : il faut attendre 1 an avant de penser à une nouvelle grossesse et j'aurais une césarienne vu qu'ils ont dû ouvrir dans le muscle. Nous qui pensions laisser la nature faire, sans qu'avoir un autre enfant devienne une obsession mais pouvoir avoir ce 2e enfant que nous devions avoir, un autre enfant qui n'aurait rien à voir avec cette première grossesse mais nous comblerait.
Je t'aime fort mon petit Nolam. Veille sur ta sœur Alyona et donne-nous la force de continuer sans toi, en t'aimant toujours aussi fort mais avec une douleur moindre, que nos souvenirs deviennent doux et que nous puissions penser à toi avec un sourire plutôt qu'avec des larmes. En espérant pouvoir voir Alyona grandir avec d'autres frères/sœurs dans un avenir très proche.