Bonjour,
par soucis de conserver le souvenir de mes garçons, mon cheminement, et peut-être partager mon expérience avec d'autres mamans qui ont perdu les jumeaux à la suite du STT, voici mon témoignage.
Bonjour,
Je me décide enfin d'écrire ce témoignage. Le 7 juillet, il y aura 1 mois que j'aurai accouché de mes fils, Danaël et Loïc à 23 sem. de grossesse. Ils étaient des jumeaux identiques. Médicalement, rien ne semblait indiquer que la grossesse se terminerait dans un tel cauchemar jusqu'à la nuit du 7 juin dans laquelle je me suis réveillée parce que j'ai perdu mes eaux. J'ai su immédiatement que le travail s'enclenchait puisque lorsque j'ai donné naissance à ma fille de 7 ans, et que le travail a débuté de la même façon, mais à 35 sem. Je me suis alors rendue seule à l'hôpital, à 2h00 am, ne voulant pas réveiller ma fille. Jamais un trajet ne m'a paru si long. Arrivée à l'hôpital, leur coeur battait encore, ce fut mon seul moment d'espoir. Mon conjoint, après avoir été mener ma fille chez une amie, m'a rejoint. Il y a eu une écho, et le couperet est tombé: les garçons étaient toujours en vie mais atteint du syndrôme transfuseur/transfusé, et Danaël avait cessé de grandir depuis à 20 sem., ce qui n'avait pas été décelé lors de l'écho de 19 sem. Quelle horreur! Les voir vivants, entendre leur coeur battre mais savoir que tout est fini, car puisque le travail avait débuté, et que ma grossesse était si peu avancée, et que le syndrôme était si marqué que je ne pouvais que leur donner naissance et accepter leur mort.
Je ne sais pas encore comment j'ai pu survivre à cette souffrance et comment je survis encore, à part que je n'ai pas eu le choix, que mon coeur à continuer de battre en dépit de la souffrance. Leur image à cette écho restera à jamais gravée dans ma mémoire. Je les ai accueillis sur mon ventre, les ai gardés auprès de moi quelques heures pour ensuite quitter l'hôpital. Une semaine suivant leur mort, nous avons récupéré leur urne qui est chez nous.
La douleur est si grande, celle de ne pas avoir pu les cajoler, les bercer, leur donner mon amour, celle d'avoir eu les seins pleins mais le ventre vide, celle d'avoir perdu mes repères et du même coup ma foi en la vie. Je donnerais tout pour avoir la certitude que le jour de ma mort je les retrouverai.
Tant d'émotions se bousculent.
Dès le début de cette grossesse, j'étais habitée à la fois par un grand bonheur mais une profonde tristesse. Je me sentais si inquiète, même si rien d'objectif ne prouvait mon inquiètude. Mon entourage me disait que je m'en faisais pour rien... Je n'y comprenais rien, je tentais de me rassurer, de les visualiser grandissant et en bonne santé et de tout mon être c'est ce que je souhaitais.
Et maintenant, c'est le vide autour de moi. Ma meilleure amie qui est restée absente m'a finalement avoué que son silence est dû au fait qu'elle débute une grossesse et qu'elle ne savait pas comment me l'annoncer, et j'avoue que je ne sais pas comment moi-même réagir face à elle: je leur souhaire tout le bonheur du monde mais je ne suis pas prête à l'accompagmer. Mon conjoint a immédiatement repris le travail et réagit en disant qu'il est confiant en l'avenir, qu'il faut avancer, que je devrais reprendre aussi le travail bientôt pour me changer les idées, qu'il a peur que je devienne déprimée, bref, je sens des tensions dans notre couple et je m'efforce, malgré ma fatigue, à lui cacher ma peine pour qu'il soit fier de moi et rassuré. De mes collègues, autres amis, c'est le silence, que je comprends car moi-même je n'aurais pas su comment réagir face à cette situation chez un proche.
Point de vue suivi, je me sens si révoltée qu'à la naissance de ma fille, j'ai eu un suivi infirmier, reçu des fleurs, de la visite, de l'aide alors que là, rien. J'ai affronté seule ma montée de lait, j'ignore si mes saignement que j'ai encore sont normaux et je sens que les gens font comme si je n'avais jamais été enceinte. Même mon conjoint dit que ma fatigue n'est pas normale, qu'après 4 sem. je devrais être en forme... Et puis même si le médecin m'a répété plusieurs fois que rien de tout cela est de ma faute, je ne peux m'empêcher de ressentir un sentiment d'échec.
Mais malgré tout, je ressens encore des moments de bonheur, de plaisir. Cela me surprend à chaque fois que je m'entends rire, ou que je ressens de brèves bouffées de bonheur malgré cette souffrance immense qui est omniprésente. Je ressens toujours autant d'amour pour mon homme, même si je sais maintenant que le deuil est une expérience solitaire. Et bien qu'il y a un côté de moi qui désire à tout prix retomber enceinte, un autre doute. Étant enfant unique, j'avais toujours rêvé d'avoir 3 enfants, une fille et deux garçons, et dans ce sens, mon rêve est déjà accompli.
Je vous ai souvent lues les dernières semaines et j'admire votre courage que j'espère que j'aurai un jour. Au moins, ici, je sais que je ne suis pas la seule à traverser cette épreuve et vous êtes pour moi des modèles de force. J'ai rejoint ce groupe pour ne pas rester seule et en espérant un jour pouvoir apporter, du support et de la compréhension. Merci de m'avoir lue,
Nath maman d'Éloïse qui aura 7 ans dans quelques jours et des bébés éternels Loïc et Danaël
Il y a maintenant 19 mois qu'ils m'ont quittée. Leur souvenir me revient à tous les jours. Ils ont préparé le nid pour Raphaël qui est né en août dernier. Mais jamais ils ne seront remplacés et je me demanderai toujours comment aurait été la vie avec eux...
Nath