Laeticia

Merci pour ton message Fairlie, bon accouchement, si ce n'est déjà fait xxx

Ma puce,

Maman se sent vide. Vide, vide, vide.

J'ai l'impression de m'être bâtie une carapace tout au long des dernières années. Une carapace épaisse, robuste. Mais voilà, il n'y a rien à l'intérieur. Sinon une petite boule d'amour pour ton frère. C'est la seule trace de vie, de bonheur.

J'ai l'impression que, si on perce ma carapace, tout va s'écrouler comme un ballon qu'on dégonfle.

Je me sens comme ça. J'ai peur d'exploser. À force de remplir, remplir, remplir avec plus de vide tout le temps.

C'est sûrement novembre. Patricia qui aurait 29 ans aujourd'hui. Papa qui se sent toujours loin de chez lui. Et maintenant moi aussi.

Je t'aime ma chérie. Tu me manques tellement...

Le temps des Fêtes arrive à nouveau ma puce.
Un quatrième Noël sans toi déjà.
Pourtant, j'ai le coeur rempli de magie.
J'ai hâte de bricoler, de faire le sapin, d'écouter de la musique avec ton frère.
Comment puis-je me réjouir si bêtement sans toi?
Je sais que je dois être heureuse pour ton frère, il le mérite, il le faut.
Mais comment puis-je faire comme si tu n'avais pas été là?
Ne pas souffrir à chaque seconde de ton silence trop long?

Il y a des jours où je vis, d'autres où j'existe.
J'ai plus l'impression d'exister que de vivre.
Trouverai-je le courage de vivre, un jour?
Même sans toi...

Je t'aime ma coccinelle d'amour.
Où es-tu petite fille invisible? Ma grande de 3 ans...
Je t'envoie des milliards de bisous. Attends-moi, j'arrive... lentement, mais sûrement.

Ma puce d'amour,

J'ai beaucoup pensé à toi hier soir. À l'horreur de la néonatalogie, à l'annonce des médecins, à mon stoïcisme et aux protestations de ton père, à la travailleuse sociale qui tentait de me réconforter mais à qui j'avais juste envie de hurler de ne pas me toucher, à ce médecin prétentieux qui ne nous avait jamais adressé la parole durant tes cinq jours de vie mais qui était autour de la table au moment de nous annoncer ta mort imminente, à mes pleurs en appelant ma mère pour lui dire "qu'ils" allaient te débrancher, tes lèvres bleutées, ton petit corps tout enflé... Les souvenirs sont lointains mais si proches en même temps. Je n'en pouvais plus, je voulais juste sortir de ce cauchemar. Je voulais que tu arrêtes de souffrir le plus rapidement possible mais aujourd'hui j'aurais aimé passer plus de temps avec toi. Te dire encore plus souvent que je t'aimais, que je te laissais partir alors que ça m'arrachait le coeur. Je voudrais te revoir aujourd'hui, à ta naissance, avec tes yeux ouverts malgré la gravité de ta situation. Tu devais avoir mal, te demander ce qu'il se passait. On t'avait arrachée à mon ventre et tu étais arrivée dans l'horreur.

Mon bébé, mon chaton, ma fille. Tu me manques tellement. Je n'arriverai jamais à accepter que je ne te connaîtrai pas, que tu ne seras plus jamais là. Que j'arrive à vivre, même sans toi.

Je t'aime Laeticia. J'aimerais qu'il y ait des mots plus forts qu'un simple "je t'aime" pour t'exprimer à quel point tu es et sera toujours tout pour moi.

Embrasse ma Patricia de ma part. Un autre Noël sans vous... Je n'arrive encore pas à y croire.

Ma puce...

Au milieu de la tempête, le 25 décembre, ton papa a déposé au creux de ma main une coccinelle qui était apparue sur lui, malgré le froid de l'hiver. Comment croire au hasard, alors que je venais à peine de te supplier de nous pardonner pour ce grand gâchis?

Ma chérie, envoie-nous tout ton amour, d'où tu es. Il nous donnera peut-être la force dont nous avons tellement besoin.

Je t'aime ma Laeticia. Je t'aime tellement...

Ma puce, mon chaton,

Mon Papi est parti vous rejoindre hier soir. Je n'arrive pas à y croire, c'est trop irréel, trop dur. Mon Papi que j'aimais tant, que j'ai toujours cru immortel, mon Papi réconfort, mon Papi à moi... Ma Laeticia, j'espère que vous serez heureux ensemble, avec Pat-Pat et tous les autres. Je trouve ça tellement dur ma fille... La vie ne m'envoie que des embûches depuis peu, j'ai peur de craquer. Et maintenant mon Papi qui est parti... Sans que je puisse le revoir, le toucher, lui dire que je l'aime. Sans revoir son sourire et entendre sa voix. Pourquoi tout fout le camp en même temps?

Je t'aime ma chérie, je t'aime ma soeur d'amour, je t'aime mon Papi qui me manquera à tout jamais.¸

Je suis si fatiguée...

Ma puce,

Ça fait plusieurs fois que je passe sur le forum, que je me rends ici et que je ne trouve pas le courage d'écrire. Pourtant, ça fait des semaines et des semaines que j'ai envie de t'écrire, de me connecter à toi. C'est malheureusement un réflexe; quand je vais mal, je pense davantage à toi.

Ça ne va pas, mon amour. Je me sens vide. Je me sens inutile. Parfois j'aimerais mieux ne pas exister. Mais je pense à ton frère et je me dis que ce serait la pire chose qui soit. Je n'ai pas d'idées bien précises, juste un sentiment soudain que j'aimerais mieux ne pas être là. Je suis fatiguée. Je suis exténuée ma chérie. Je ne sens pas que je fais une différence dans le monde dans lequel je suis. J'ai l'impression d'être toujours en arrière-plan. Oui, c'est exactement ça. Je me sens en arrière-plan. Et j'en arrive à croire que je ne vaux pas mieux que ça. Je me regarde dans le miroir et je désespère. Ce n'est pas moi que je vois. Je suis difforme. Un échec de plus. Je les cumule depuis ta mort. Il n'y a que ton frère qui est une victoire, une fierté. Mais quand je me dis qu'il est bien la seule chose qui en vaille vraiment la peine, j'ai le terrible sentiment qu'il pourrait m'être enlevé à tout moment. Un moment d'inattention, un faux mouvement, une malchance et tout part en fumée. Comme toi. Ton destin n'était pas de mourir. Tu étais en pleine santé, belle comme un coeur. Tu ne devais pas naître pour souffrir et mourir.

J'ai besoin d'énergie ma puce. Besoin de positif. Besoin de croire en moi à nouveau. C'est si dur... Je retombe dans la spirale infernale.

Je t'aime ma coccinelle. Ma petite étoile éloignée.

Dis à ma Patricia que je vous aime plus que tout. Attendez-moi... Laissez-moi aimer et prendre soin de mon Yoann toute une vie et j'arriverai à vos côtés. C'est promis, plus jamais je ne te laisserai.

Ma puce d'amour,

Ton frère a deux ans aujourd'hui. On dirait que je n'ai pas tellement le coeur à la fête. Je suis fière et mon coeur déborde d'amour pour lui mais je voudrais que sa grande soeur de trois-ans-presque-quatre soit avec nous. Que tu sautes partout, t'excitant comme si c'était ton propre anniversaire. Que tu prennes ton petit frère maladroitement dans tes bras et que lui colle un énorme bisou sur la joue, pendant qu'il se débat en criant "Maman, mamaaaaaan!". C'est ça que je rêve d'avoir. Mes deux enfants présents à chaque moment de ma vie. Je voudrais te voir grandir, toi aussi. Je voudrais t'entendre parler, toi aussi. Je voudrais pouvoir te serrer dans mes bras aussi souvent que je le souhaite. Ma vie est incomplète sans toi, ma chérie. Elle le sera pour toujours...

... et aujourd'hui il y a 14 ans que ta tante est décédée ma puce chérie.

J'ai toujours aussi mal. J'ai envie de crier quand je pense à ses derniers instants. Envie de m'arracher le coeur tellement ça fait mal.

Pourquoi? Pourquoi? Pourquoi? 

Je pense à toi ensuite et je me demande comment on peut avoir perdu deux personnes si importantes et continuer à vivre... C'est trop. C'est beaucoup trop pour un seul et même coeur.

Je vous aime mes amours. Plus que tout.

À une semaine de tes quatre ans, ma puce, la douleur est de retour. Vive et envahissante. La colère n'est pas complètement disparue. Saloperie de mort qui t'a arrachée à moi. Je voudrais tellement que tu sois avec nous, ton frère serait fou de toi. Et moi aussi.

Laeticia, mon coeur saigne. Il t'appelle sans cesse. Je voudrais tellement retourner en arrière et faire autrement...

Je t'aime ma chérie. Je t'aime infiniment et pour toujours.

Un 29 juillet,
Tu es née,
Blanche et silencieuse.
À bout de forces,
Tu as ouvert les yeux sur le monde,
Même s’il n’était que promesses sombres.
C’était le début,
Et pourtant, c’était aussi la fin.
Sous le choc, je n’ai pas compris,
Compris l’urgence de t’aimer autant que possible,
Compris que peu de sable coulait dans ton sablier.
J’ai vécu ce cauchemar sans comprendre,
Un peu en dehors de mon corps,
Complètement en dehors du temps.
Je t’ai portée jusqu’à la fin,
Pleurant en t’embrassant,
Et, voyant tes lèvres bleues et ton souffle perdu,
J’ai su qu’il n’y aurait pas de deuxième chance.
J’ai quitté cet hôpital maudit,
Quitté ton corps sans vie,
Sans croire que c’était vrai,
Sans crois que c’était notre destin.
La douleur a pris ta place en mon sein,
Elle a grugé chaque atome de moi,
Devant elle, j’ai abdiqué,
Elle était tout ce qu’il me restait de toi.
Laeticia,
Petit papillon éphémère,
Étoile éternelle,
Je n’y crois toujours pas.
Ma fille,
Promets-moi
Qu’un jour, je serai à nouveau avec toi.

Mon amour, ma puce,

Tu es avec moi aujourd'hui, tu es dans mes pensées et dans mon coeur. Tu es celle qui a ouvert le chemin et tu seras toujours ma toute première. Tu es la raison pour laquelle nous existons comme famille et je te suis infiniment reconnaissante de tout l'amour que tu as su apporter dans nos vies par ton court passage sur Terre.

Je t'aime follement ma Laeticia...

Bonjour ma puce,

Ça fait des mois que je veux venir te parler et que je ne le fais pas. La dernière fois où je suis venue t'écrire, je venais à peine de faire le test de grossesse. Je n'y croyais pas et pourtant, oui, cette petite vie avait déjà envie de se manifester.

Depuis, j'évolue au fil de la grossesse. Parfois c'est la tempête, parfois c'est tout doux.

En décembre, nous avons su que c'était une petite fille. J'étais folle de joie. On m'a arraché ma première mais la vie me fait à nouveau le cadeau d'une petite poulette. Ton papa et moi regardons les clichés de ta soeur et nous savons déjà qu'elle sera aussi belle que toi. Je dois t'avouer que j'ai un peu peur du jour J. Et si elle était pareille à toi? Comment réagirai-je? Je sais bien que j'ai beaucoup cheminé depuis 5 ans. Je sais que ce ne sera pas toi. Mais c'était beaucoup plus facile de me distancier de toi avec ton frère. Cette fois-ci, je ne sais pas comment ça va se passer. Bien, je crois. J'ai confiance en moi, en nous tous. Nous formons une famille atypique mais une famille quand même. Tu as ta place et tu l'auras toujours.

Le 25 décembre, j'étais chez ma soeur dans le jardin. Tout d'un coup, j'ai vu une petite coccinelle sur une pierre. Ça m'a chavirée. L'année passée aussi, c'était un 25 décembre. Oh, ça peut n'être que le hasard mais depuis ton départ, c'est une constante. Alors j'espère de tout mon coeur que c'est toi qui ne m'oublie pas. Qui me dit que tu m'attends. Que tu m'aimes. Que tu es à mes côtés à ta façon.

Je t'aime de tout mon coeur ma chérie. Veille bien sur ton frère et ta soeur si tu le peux. Toujours ils sauront qu'une magnifique princesse guerrière les a précédés.

Je t'envoie des milliards et des milliards de bisous étoilés. Je voudrais tellement que tu sois là avec nous...

Bonjour ma puce, mon amour,

Je ne viens plus souvent t'écrire. Ça va, c'est une décision que j'ai prise il y a longtemps. Je pense beaucoup à toi, ma coccinelle. Avec mon ventre qui est devenu énorme, on me demande souvent j'en suis à combien d'enfants. Je réponds trois. Quand on me demande ensuite votre âge, j'explique que tu es décédée. C'est comme ça. Ça me met mal à l'aise de mettre les gens mal à l'aise mais c'est la vérité. Je t'ai portée 9 mois, je t'ai aimée, je t'ai laissée partir contre mon gré. Tu as existé mon amour. Alors je te nomme.

Aujourd'hui j'en suis à 39 semaines et 4 jours de grossesse. Un record! J'arrive à gérer, à croire que cette petite a droit à une fin heureuse. J'attends patiemment qu'elle se décide à sortir. Je chasse de la main les pensées morbides. Ton frère est là, il est en vie, il est en pleine santé. Votre mini-soeur vivra. C'est ça, la normalité. Pas ton triste destin à toi... Alors j'attends. Et je prie que tout se passe bien.

Ma belle petite fée, j'espère que tu nous accompagnes d'où tu es. Ton papa, ton frère, ta soeur et moi te devons tellement.

Je t'aime Laeticia, encore et toujours.
J'espère que Patricia et toi m'attendez là-haut.
Je vous aime tellement...

Accompagne-moi ma puce.
Je t'en prie, sois à mes côtés.
Sers la main de ta maman dans la tienne.
Insuffle-moi des forces.
Envoie-nous ton amour, qu'il nous remplisse et soit plus fort que le reste.
Je t'aime ma chérie.
Je suis fatiguée, si fatiguée...

Bonjour ma puce,

Tu aurais 5 ans, tu entrerais à la grande école ce matin. J'aurais le coeur serré de te voir partir avec tes nouveaux amis. Je me demanderais si tout ira bien, si tu intégreras bien ton nouveau milieu de vie, si tu aimeras ta nouvelle enseignante. Je serais fière de te voir si grande.

Ce matin c'est ton frère que j'ai accompagné dans son nouveau CPE. Avec notre mini habillée dans un petit vêtement qui t'appartenait. Ta soeur est magnifique, je suis complètement en amour avec elle. J'ai toujours rêvé d'une fille mais c'est avec elle, et pas avec toi, que je découvre comment c'est. Je voudrais tellement que vous soyez là tous les trois. Je serais épuisée mais complète. Au lieu de ça, je serai toujours amputée de toi. Il manquera toujours un tiers de moi et rien ni personne ne pourra jamais combler ce vide abyssal que ta mort a creusé.

Je t'aime ma coccinelle, tu n'est pas oubliée. Toujours tu feras partie de moi, toujours tu seras dans mon histoire, dans notre histoire.

Des millions de bisous à tous ceux que j'aime là-haut, j'espère qu'ils te donnent tout l'amour du monde en attendant que je vienne te rejoindre un jour.

Je t'aime.

Ma puce,

Ma toute belle puce,

Ma Laeticia.

Le mois de juillet m'est tombé dessus comme un poids immense et la douleur que tu m'aies été arrachée si subitement me brise à nouveau. Ce soir, j'ai senti le besoin viscéral de me connecter à toi à nouveau. D'être ta maman à toi. En l'absence de ton frère et de ta soeur, j'ai eu envie de prendre le temps d'être ta maman.

La vie a pris une tournure dramatique pour notre famille. Depuis quand, je ne sais pas? Mais Patricia et toi avez été mises en suspense durant cette période de turbulences. Le deuil évolue au fil des années mais jamais il ne prend fin. Je suis heureuse d'être capable de le mettre sur pause mais j'ai besoin de savoir que tu fais toujours partie de moi. Que vous faites toujours partie de moi.

Mon doux petit bébé, j'essaie de te garder vivante mais je n'y arrive pas. Ton souvenir se diffuse au fil des années et j'ai peur de te perdre, peur de te laisser aller complètement. Je ne sais plus quelle est la bonne façon d'être ta maman ni si je suis toujours à la hauteur de l'amour que je devrais avoir pour toi.

Tout s'est écroulé. J'ai toujours senti que tu étais mon bébé, mon amour. Que tu étais mienne. Aujourd'hui je le ressens plus que jamais. Avons-nous jamais été capable de partager notre parentalité pour toi? Avons-nous jamais été capables de faire les choses comme elles se doivent? Tout s'est écroulé et je n'ai plus personne avec qui partager ta vie. Je ne sais même plus quelle place tu occupes dans mon quotidien. Est-ce que je suis devenue une mère insensible? Une demi-mère pour toi?

Ton frère et ta soeur grandissent, ils sont merveilleux. Chaque moment où je peux les regarder, les toucher, les avoir auprès de moi, sont des moments que je sais précieux. Je sais que j'ai fait le bout de chemin que je devais faire: j'ai confiance que la mort ne me les arrachera pas. Est-ce excessivement naïf? Je ne sais pas mais je suis reconnaissante d'être capable de vivre comme si la mort ne faisait pas partie de la vie.

Ce soir, j'ai pensé à toi. À chaque minute de ta vie hors de moi. À la douleur, à la peur, à l'impuissance, à la haine. Ta petite vie a été si courte. Quel sens puis-je y trouver? Dois-je me pardonner d'être capable de vivre sans toi?

Ce soir, j'ai tellement besoin de te parler. De te dire que tu n'es pas oubliée, que tu ne le seras jamais. Où es-tu petite perfection? 

Je t'aime. Si tu savais... Mon amour. Je t'aime.

Ma petite puce,

Un autre temps des Fêtes s'amorce sans ton petit corps tout chaud au creux de mes bras. Je suis allée chercher un petit ornement pour toi aujourd'hui, pour mettre dans le sapin de Noël de notre nouvelle vie. Il est là, près de la cime, le plus près du ciel possible, pour te dire que tu fais partie de notre famille. Notre famille brisée, notre famille reconstruite, notre famille soulagée. Notre famille qui, peu importe la forme, te comptera toujours dans son coeur.

Hier, je suis allée chez papa chercher des choses. Le manque d'espace n'aidant pas dans la nouvelle maison, je n'ai pas pu ramener tout ce que je voulais. Dans ma boîte à souvenirs, je n'ai pris que le portrait de ta tante Patricia et de son amoureux Sébastien. J'avais besoin d'avoir leurs visages près de moi, de les sentir présents. Je les regarde ce soir et j'ai le coeur apaisé. Je les sens près de moi, malgré leur silence si pesant.

La maison est silencieuse, et il ne reste plus que moi et mes morts qui veillent. Je t'ai pleurée ces jours-ci, ma Laeticia. Ton absence fait partie de moi et elle me déchire encore tellement. Je l'accepte car, après 7 ans, il est difficile d'en faire autrement. Mais j'aimerais tellement que tu sois parmi nous. Que tu connaisses ton doux frère Yoann et ta malicieuse soeur Élise. Ils ne savent pas à quel point tu fais partie de nous. J'essaye bien de leur inculquer l'importance de ton souvenir mais ils sont si petits et ton existence est si abstraite; ils ne comprennent pas tellement que tu as été réelle.

Petite perfection, nous cheminons dans les méandres de la vie en tentant tant bien que mal de faire ce qui est le mieux pour tout le monde. J'ai tellement de doutes et de craintes. Tellement de remises en question. Est-ce que je prends les bonnes décisions pour ton frère et ta soeur? Est-ce que je suis la maman qu'ils méritent d'avoir?

Cette semaine, j'ai eu peur. Peur de les perdre, peur qu'il leur arrive du mal. J'ai été prise d'un vertige immense, que seule la raison a pu dissiper. Mais je ne pourrais pas imaginer ma vie sans eux. J'ai déjà tellement souffert, l'idée qu'on puisse me les arracher un jour, d'une façon ou d'une autre, me terrifie.

Petite coccinelle, ton souvenir est si vivant en moi, mais encore si douloureux, je ne sais pas comment j'ai pu survivre toutes ces années sans te voir grandir. Tu as été si courageuse, si forte, si brave, j'ai l'impression de ne pas être l'humain que je devrais être pour faire honneur à ton souvenir. L'amour que j'ai pour toi est aussi fort qu'au premier jour. Tu es ma fille d'amour, ma raison de vivre, ma raison de mourir. Je t'aime follement, petite étoile.

Veille sur ton frère et ta soeur. Attends-nous. Embrasse ta tante et son beau Sébastien. Promets-moi que notre amour ne sera plus qu'un, un jour.

Je t'aime. Follement. Infiniment. Pour toujours.

Ma belle petite puce,

Je ne sais plus combien de jours me séparent du dernier message. Je ne sais plus combien de jours me séparent des dernières larmes, du sentiment de révolte, de la douleur de t'avoir perdue. La vie continue sans tes petites mains, ton sourire et tes yeux rieurs. La vie continue sans jamais avoir commencé.

Aujourd'hui je suis allée dans une librairie pour acheter des livres pour un voyage. Je cherchais à tout hasard et je suis tombée sur un livre qui raconte l'histoire d'une maman qui a perdu sa fille il y a 9 ans. Un tout petit bébé qui avait un mois de vie, et qui est repartie aussitôt. J'ai acheté le livre sans réfléchir, en ressentant un immense besoin de lire les mots d'une maman qui relate les effets du temps sur le deuil. La place que prend un enfant perdu après tant d'années. Et j'ai réalisé que nous allions célébrer notre 9ième anniversaire de séparation cette année,nous aussi. 9 ans! Tu serais si grande, mon amour. Tu serais presque adolescente. Tu serais Laeticia. Tu serais réelle.

Cette longue séparation creuse un gouffre entre ma maternité de toi et celle que je vis réellement avec ton frère et ta soeur, entre la possibilité de te toucher et celle de t'imaginer, entre la chance que j'aurais pu avoir de te connaître et celle de m'y résigner. Je rêve de t'entendre parler. De découvrir ta personnalité. De voir ton joli visage évoluer au fil des années.

Laeticia, où es-tu? As-tu vraiment existé? Existeras-tu toujours quand je mourrai à mon tour? Étais-tu un rêve éphémère qui a pris fin avec ton dernier souffle?

Ma puce, mon amour, ma vie, ma chérie, j'ai appris à vivre sans toi. À mettre les priorités ailleurs. À vivre sans ta petite main dans la mienne. Me pardonnes-tu d'être ta maman à temps partiel? Me pardonnes-tu de vivre sans souffrir à chaque seconde que la vie me donne sans toi? Seras-tu là, ma Laeticia, au bout du chemin? Prendras-tu ma main en me disant que rien n'a été perdu? Que tu as été là tout ce temps?

Nous regardes-tu avec amour et compassion? Nous aimes-tu autant que nous continuons de t'aimer, malgré le temps qui s'est arrêté pour toi?

Seras-tu là, mon amour? M'attendras-tu avec Patricia, et des dizaines d'années d'amour à rattraper?

Ma fille, ma grande, ma belle, mon unique, je t'aime d'un amour diffus mais intense. Je t'aime de tout mon coeur et de toutes mes tripes.

Attends-moi. Mon amour, attends-moi. Je viendrai à toi. Je souhaite de tout coeur pouvoir venir à toi, et que nous ne fassions qu'une enfin.

Ta maman.

Ma puce,

Il y a 12 ans, je vivais ma dernière journée de grossesse. Heureuse et insouciante. Tu étais là, vigoureuse et tellement vivante. Je n'ai plus la force d'avoir mal. C'est peut-être égoïste. Dès que je sens la douleur monter, que je sais qu'elle va m'arracher les tripes, je ferme tout et je bloque. J'ai tellement souffert. Je souffre encore tellement de ton absence. Je m'en veux de ne pas avoir pu te donner la vie. Je m'en veux que tu aies vécu ces seuls cinq jours si difficiles. Je donnerais tout pour t'avoir à mes côtés et te voir grandir aux côtés de ton frère et de ta soeur.

Je t'aime mon amour. Demain commence le décompte de cinq jours. Je vais passer à travers. Comme à chaque année. Pardonne-moi si je ravale mes larmes, cette douleur est encore trop vive pour la supporter.

Attends-moi ma belle fille, sois là au bout du chemin. Ta maman t'aime tellement.